"La France gagnerait à être plus visible sur l'aide à la transition vers un développement plus juste et plus durable". Le rapporteur du projet d'avis sur la politique française de coopération internationale, Philippe Jahshan, espère bien que les mesures adoptées le 12 octobre en assemblée plénière du Cese remettront la France sur le devant de la scène du développement. Dans le cadre de l'agenda 2030 du développement durable, fixé par l'Organisation des Nations unies (ONU), il s'agit pour la section des affaires européennes et internationales de formuler des recommandations afin que le gouvernement atteigne ses 17 Objectifs de développement durable (ODD) et respecte ses engagements de l'Accord de Paris.
Des réformes institutionnelles et méthodologiques
L'avis incite tout d'abord à faire de la durabilité un critère politique transversal, influant chaque dimension d'un projet d'aide au développement. "Un agenda réduit à quelques objectifs ne suffit pas", affirme Philippe Jahshan, l'Etat devant se doter d'une véritable stratégie pour l'agenda du développement durable, tant au niveau national que mondial.
Pour ce faire, le pilotage politique et stratégique de la coopération française doit gagner en efficacité et en visibilité. D'où la recommandation d'instaurer un ministère chargé de la coopération internationale pour le développement durable. L'instance serait responsable du budget et de l'expertise technique alloués à l'aide publique au développement (APD). Le ministère désignerait notamment l'ensemble des représentations françaises dans les instances multilatérales de l'aide au développement.
Pour une aide plus juste et participative
Sur la voie d'un développement réducteur des inégalités, le Cese préconise notamment de rééquilibrer l'aide au développement en faveur des dons. L'assistance française est aujourd'hui constituée à 90% de prêts. Une hausse de la part des dons permettrait un gain de souplesse pour les pays les moins avancés (PMA) ou les nations en crise, dont la situation financière est souvent trop critique pour subir les conditions d'un prêt. Cette recommandation fait partie d'une réforme globale de la politique d'APD. L'abandon de l'approche Nord-Sud en fait partie. Il s'agit pour le Cese de développer un agenda partenarial différencié entre les pays émergents et les pays les moins avancés. Le premier groupe bénéficierait d'un soutien autour du pilier social et des enjeux de la transition écologique lorsque le second serait accompagné face aux problématiques d'urgence ainsi qu'aux politiques de long terme.
Le Cese préconise également d'ouvrir la coopération en matière de développement. Il s'agit tout d'abord de renforcer et de mieux valoriser le rôle de la société civile. Pour rappel, la France, avec 2% des financements alloués aux ONG dans le cadre d'une aide au développement, se situe bien en deçà de la moyenne de l'OCDE, autour de 17%. Enfin, le conseil estime que les entreprises doivent devenir de véritables actrices du développement durable. Une telle conversion passerait notamment par l'intégration de la responsabilité sociale et environnementale dans les achats publics au niveau du droit national.
Ces préconisations serviront au comité interministériel pour la coopération internationale au développement (CICID), dont la réunion se tiendra en novembre 2016. L'occasion pour le gouvernement français de redéfinir les priorités de sa politique de coopération internationale inscrites dans la Loi d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (LOPDSI).